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ETUDES, GUIDES ET RAPPORTS
Trudelle, Catherine ; Klein, Juan-Luis ; Fontan, Jean-Marc ; Tremblay, Diane-Gabrielle
Montréal : Les Cahiers du CRISES, septembre 2011
Dans un contexte d’essor de sociétés diversifiées et de profondes mutations des espaces urbains, les rapports à l’État des acteurs de la société civile ne cessent d’évoluer, ce dont témoignent les expériences d’adaptation des collectivités locales à la mondialisation, voire de reconversion territoriale (Fontan et al., 2003). Les inégalités sociales et les dynamiques territoriales se complexifiant sans cesse, les situations de tension et de conflits se multiplient. Les acteurs sociaux se mobilisent en revendiquant le droit des citoyens de conserver leur milieu de vie et de travail ainsi que leur qualité de vie, se confrontant ainsi tantôt aux élites locales, tantôt aux acteurs publics (Fontan et al., 2005). Ces conflits se font sentir avec intensité dans les aires métropolitaines, y étant fréquents en raison de la divergence des intérêts et des valeurs portées par la diversité d’acteurs en présence. Ceux-ci s’opposent au sujet des projets à mettre en œuvre en réaction à des problèmes socioéconomiques, des affectations à donner à des espaces concrets, des services à créer ou à conserver ou des orientations à privilégier (Trudelle et al., 2006). Les conflits matérialisent l’insatisfaction des populations qui, à travers l’activité conflictuelle, tentent d’inscrire leurs enjeux à l’agenda politique de façon à changer le statu quo. Plusieurs de ces événements matérialisent le « droit à la ville » revendiqué par les citoyens de tous horizons socioéconomiques et territoriaux et portent la lutte pour le droit d’exercice de la citoyenneté, au sens social du terme (Castel, 2009). En même temps qu’ils donnent à voir l’intensification des tensions sociales, dans certaines circonstances et à certaines conditions, les conflits urbains participent à la mise en œuvre de modalités localisées de résolution de conflits, d’établissement de compromis et de gouvernance locale. Ceci se matérialise par plusieurs dispositifs de participation citoyenne, par exemple, et par la mise sur pied de nombreux projets de revitalisation urbaine dans des « quartiers orphelins » (Fontan et al., 2003), c’est-à-dire des quartiers laissés à eux-mêmes en période de profondes mutations économiques et sociales qui ont conduit à leur dévitalisation. Nos travaux mettent en lumière l’effet structurant des initiatives qui mobilisent des ressources de l’économie sociale et de l’action communautaire en vue d’assurer une reconversion des espaces locaux et de mettre en place des dynamiques de développement local et d’inclusion socioterritoriale. (Tremblay et al., 2009 ; Klein et al., 2009a). Notre hypothèse de travail est qu’au sein de la sphère de l’économie sociale et l’action communautaire sont incubées des actions collectives au niveau local qui participent à la recomposition des dispositifs de régulation à l’échelle locale. À l’aide de l’étude de cas du quartier Saint-Michel à Montréal (Québec, Canada), pour laquelle nous avons mené une recension des écrits et une enquête par entrevues, nous verrons comment les conflits urbains ont participé à la construction d’une gouvernance locale qui nous apparaît inclusive. Nous serons en mesure de démontrer que cette recomposition des dispositifs de régulation à l’échelle locale puise dans deux grands registres d’action. Un premier est lié à des actions collectives conflictuelles opposant une population locale et des instances publiques et privées. Un deuxième est lié à des actions de revitalisation territoriale regroupant dans une certaine forme de confrontation une variété d’acteurs endogènes et exogènes au territoire. L’étude du cas de l’établissement de la Cité des arts du cirque, qui deviendra la TOHU en 2003, dans le quartier montréalais Saint-Michel, nous permettra de comprendre le rôle joué par les conflits dans une phase de recomposition identitaire du territoire. Nous verrons que l’imbrication de la Cité des arts du cirque, qui est en fait un projet exogène dans le tissu social du quartier, relève de la capacité des acteurs à assimiler un projet et à en faire un atout pour la collectivité locale. Comme on le verra, cette capacité est le résultat d’une décennie de luttes urbaines et d’apprentissage collectif. Le texte est présenté en cinq étapes. En premier lieu, nous élaborons notre problématique et nous précisons nos sources d’inspiration théorique, lesquelles sont les régimes urbains, l’action collective et le néoinstitutionnalisme. Nous montrons que la combinaison de ces approches permet une lecture adéquate des conflits qui jalonnent la construction institutionnelle d’un quartier, ainsi que de la capacité de celui-ci de générer des mécanismes de régulation qui font en sorte que lesdits conflits renforcent la collectivité locale. En deuxième lieu, nous exposons la méthodologie de la recherche. Troisièmement, nous ferons une présentation du quartier étudié en insistant sur l’évolution des différents vagues de luttes qui ont permis la construction d’un milieu réceptif à l’établissement d’un projet majeur de nature culturelle. Ensuite, nous présentons l’analyse. Nous verrons que les luttes sociales ont contribué à la cohésion et au développement de partenariat entre les acteurs locaux et les acteurs exogènes, mais que cette concertation ne va pas de soi et exige une constante pression des représentants de la communauté micheloise.
Dans un contexte d’essor de sociétés diversifiées et de profondes mutations des espaces urbains, les rapports à l’État des acteurs de la société civile ne cessent d’évoluer, ce dont témoignent les expériences d’adaptation des collectivités locales à la mondialisation, voire de reconversion territoriale (Fontan et al., 2003). Les inégalités sociales et les dynamiques territoriales se complexifiant sans cesse, les situations de tension et de ...
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